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Chancre cytosporéen

Renseignements généraux et importance

Cytospora chrysosperma provoque des chancres sur une large gamme d'espèces d'arbres feuillus. Il s'agit d'un pathogène faible et opportuniste, et par conséquent, les hôtes doivent être prédisposés par des conditions telles que la sécheresse, la défoliation répétée, les dommages causés par les maladies ou les insectes, les dommages causés par le soleil, la suppression par l'ombre, le gel ou la déficience en éléments nutritifs pour que les chancres se développent. Le chancre cytosporéen n'apparaît pas sur des branches ou des troncs d'arbres sains et vigoureux. Sa présence indique une cause sous-jacente de stress physiologique. Cette maladie peut entraîner des pertes importantes dans les marcottières (rangées serrées d'arbres en taillis cultivés pour produire des pousses multiples qui sont coupées pour la propagation), ou dans les nouvelles plantations plantées avec des boutures provenant de marcottières. Le symptôme que C. chrysosperma provoque dans ces circonstances est appelé « tige noire » en raison du noircissement des tissus internes qui peut être clairement vu à travers l'écorce fine.

Aire de répartition et hôtes

Le chancre cytosporéen est présent dans le monde entier sur un large éventail de feuillus. Au Canada, il a été signalé en Alberta, en Colombie-Britannique, au Manitoba, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, au Québec et en Saskatchewan.

Au Canada, les principaux hôtes sont les espèces de peupliers (Populus) et de saules (Salix). Le chancre cytosporien a également été signalé au Canada sur des espèces d'érable (Acer), d'aulne (Alnus), d'amélanchier (Amelanchier), de bouleau (Betula), de cornouiller (Cornus), d'aubépine (Crataegus), de chalef (Elaeagnus), de pommier (Malus), de seringa (Philadelphus), de cerisier et de prunier (Prunus), de sureau (Sambucus) et de sorbier (Sorbus). Cependant, plus de deux cents espèces différentes appartenant à des dizaines de genres de feuillus sont répertoriées comme hôtes dans le monde entier. L'analyse moléculaire récente d'isolats frais de Cytospora provenant de plantes atteintes de chancres et situées dans diverses régions géographiques a permis de décrire de nombreuses nouvelles espèces. Au fur et à mesure que les études taxonomiques se poursuivent, les associations d'hôtes et les aires de répartition des espèces de Cytospora, en particulier de C. chrysosperma, pourraient être définies de manière plus précise.

Parties de l'arbre affectées

Rameau, branches et troncs d'arbres.

Symptômes et signes

Cytospora chrysosperma peut provoquer une nécrose de l'écorce qui s'étend, des lésions localisées ou des chancres en cible pérennes. Les chancres sont causés par la formation de cals par l'hôte sur le périmètre du chancre au cours de chaque saison de croissance. Lorsque l'arbre est en dormance pendant l'hiver, le cal est envahi par la croissance fongique, ce qui entraîne la mort des tissus. Ce cycle annuel répété de formation de cals et de mort au fur et à mesure que le champignon se développe forme des anneaux concentriques, ce qui donne un chancre qui ressemble un peu à une cible.

Sous l'écorce, les tissus infectés prennent une coloration orange ou brune, dégagent une odeur aigre et finissent par noircir. Les premiers stades du chancre peuvent également être détectés sur les surfaces externes lisses de l'écorce du peuplier, car elles deviennent orange ou brunes à mesure que les tissus meurent. Les fructifications produisant des conidies, appelées pycnides, se développent dans les tissus de l'écorce morte. Ils sont globuleux ou irrégulièrement lobés, avec une ouverture circulaire centrale (ostiole) qui pousse l'écorce et s'ouvre à sa surface. Si le chancre se trouve sur une branche ou une tige à l'écorce fine, les pycnides qui se forment sous l'écorce la rendent rugueuse. Les pycnides ont un diamètre de 0,5 à 1 millimètre. Leur intérieur est replié en un ensemble convoluté de lobes tapissées de cellules conidiogènes (produisant des conidies) filamenteuses, souvent ramifiées, mesurant 10 à 40 micromètres de long sur 1 micromètre de diamètre. Les cellules conidiogènes produisent des conidies hyalines, en forme de saucisse, unicellulaires, mesurant en moyenne 3 à 5 micromètres de long sur 1 à 1,5 micromètres de diamètre. Des masses de conidies sont extrudées en fines vrilles orange rougeâtre à partir des ostioles pendant les périodes de forte humidité. Ces vrilles de spores peuvent s'enrouler et s'étendre sur plusieurs centimètres de long.

Les périthèces se forment après le développement des pycnides et remplacent souvent les vieilles pycnides aux mêmes endroits chancrés de l'écorce. Six à douze périthèces se forment en grappe étroitement entourée d'une masse dense de tissu fongique appelée stroma. Les périthèces sont coniques, d'un diamètre de 0,3 à 0,5 millimètre, d'un brun grisâtre foncé, avec un long col étroit. À la surface de l'écorce, les cols des périthèces s'ouvrent collectivement dans le même ostiole, qui est entouré d'un disque gris clair à gris foncé de 0,5 à 2 millimètres de diamètre. Les asques, qui se forment sur les parois des périthèces, sont en forme de massue et mesurent 30 à 45 micromètres sur 5 à 7 micromètres. Ils comportent huit spores et sont plus larges à l'extrémité apicale, qui est aplatie et porte un anneau hyalin. Les asques se détachent de la paroi du périthèce et flottent librement à l'intérieur du périthèce lorsqu'ils sont matures. Les ascospores sont hyalines, allantoïdes, unicellulaires, mesurent 7 à 12 micromètres sur 1,5 à 2,5 micromètres, et ne sortent pas des ostioles en vrilles de la même manière que les conidies. Lorsque le contenu des périthèces se gonfle par temps humide, les asques sont extrudés de l'ostiole périthécial et éjectent de force les ascospores, qui sont transportées par le vent.

Cycle de la maladie

Les chancres ont deux sources d'inoculum : les conidies (disséminées par le vent et l'eau) et les ascospores (éjectées de force des périthèces et transportées par l'air). Les conidies sont de loin la forme la plus abondante d'inoculum et sont libérées tout au long de l'année par les pycnides qui se développent rapidement et de manière prolifique dans les tissus récemment tués, plusieurs semaines après l'infection. Les pycnides extrudent des quantités massives de conidies dans des vrilles de spores, qui deviennent dures et cassantes par temps sec. Par temps humide, les conidies contenues dans les vrilles de spores suintent hors des pycnides. Les vrilles de spores se dissolvent et les conidies sont disséminées par la pluie et les éclaboussures. 

Les périthèces sont moins fréquents et se développent plusieurs mois, voire l'année suivante, après la formation des pycnides. Les ascospores sont généralement libérées par les périthèces au printemps. Les jeunes arbres du sous-étage peuvent être infectés par les spores produites sur les chancres des branches ou des tiges des arbres matures adjacents ou en surplomb.

Les conidies ou les ascospores peuvent infecter les blessures mécaniques et celles causées par les insectes, les petites ouvertures naturelles (cicatrices de déhiscence des bourgeons ou des feuilles) et les lenticelles sur des hôtes prédisposés par d'autres facteurs dommageables. Les spores peuvent initier des infections jusqu'à 10 jours après que le tissu végétal ait été blessé. Les chancres apparaissent souvent pendant la saison de dormance, lorsque la réaction de l'arbre hôte au pathogène n'est pas aussi vigoureuse et que le temps humide est plus fréquent. Il a été démontré que C. chrysosperma peut être présent mais asymptomatique sur l'écorce ou dans les tissus des bourgeons sur des hôtes qui semblent être sains. Les boutures de branches ou de tiges de peuplier asymptomatiques développent rapidement des fructifications de C. chrysosperma si elles sont incubées dans des conditions sèches. Le champignon a également été isolé directement à partir d'écorces saines. La sécheresse est un facteur prédisposant majeur pour l'établissement généralisé du chancre cytosporéen. Les arbres soumis à un stress dû à la sécheresse sont incapables d'établir de manière adéquate des mécanismes de résistance pour protéger les zones endommagées contre les infections, comme la formation de tissus de cals sur les blessures. Si l'hôte est gravement stressé, le champignon s'établit et n'est pas entravé par la résistance de l'hôte. Le champignon se développe rapidement et provoque une mort généralisée des tissus ainsi qu'un chancre diffus qui s'étend rapidement. Les arbres ayant une réaction de défense plus active (par exemple, ceux dont les dommages se limitent à une blessure) développeront des chancres en forme de cible si la blessure s'infecte.

Dommages

Dans les forêts naturelles, les chancres cytosporéens contribuent à l'éclaircissement des jeunes pousses et des jeunes arbres supprimés et accélèrent la mort des arbres stressés par d'autres facteurs biotiques et abiotiques. Ils peuvent causer de sérieux dommages et des pertes dans les jeunes plantations et les environnements horticoles, en particulier dans les plantations denses et à croissance rapide telles que les marcottières de peupliers hybrides.

Prévention et répression

Les stratégies de répression d’un ravageur particulier varient suivant plusieurs facteurs, notamment :

L’acquisition d’information sur chacun de ses facteurs est nécessaire aux prises de décisions relatives à l’application de l’une ou l’autre des stratégies de lutte contre un ravageur. Ces facteurs devront être soigneusement mis en balance par rapport aux coûts et avantages avant qu'on entreprenne toute action contre un ravageur particulier.

Tous les protocoles d’aménagement forestier qui réduisent les blessures et le stress des arbres hôtes réduiront également l'incidence du chancre cytosporéen. Si des boutures sont utilisées pour des plantations (une pratique courante pour les peupliers hybrides), elles doivent être inspectées dès leur sortie de l'entrepôt pour détecter les premiers symptômes de tiges noires (zones décolorées). Il faut veiller à éviter le stress dû à la sécheresse et les dommages causés par le soleil jusqu'à ce que le système racinaire soit bien établi.

Les pesticides homologués pour être utilisés contre C. chrysosperma dans des situations particulières peuvent changer d'une année à l'autre. Ainsi, pour connaître les produits actuellement homologués et pour obtenir des renseignements quant à leur usage contre ce pathogène, veuillez consultez la base de données Information sur les produits antiparasitaires de Santé Canada. Tout produit homologué devrait être appliqué en fonction de la taille de la population et seulement lorsque nécessaire et au stade de maladie indiqué. Il est recommandé également de consulter un professionnel local en arboriculture. Les pesticides peuvent être toxiques pour les humains, les animaux, les oiseaux, les poissons et d’autres insectes utiles. Veuillez, par conséquent, appliquer les produits homologués uniquement en cas de besoin et conformément aux indications inscrites sur l’étiquette du fabricant. Dans certaines juridictions et dans certaines situations, seul un professionnel autorisé peut appliquer des pesticides. Il est recommandé de consulter les autorités locales compétentes pour déterminer les réglementations locales en vigueur.

Photos

Chancre causé par <em>Cytospora chrysosperma</em> sur la tige du peuplier faux-tremble.
Infection et chancre résultant de <em>Cytospora chrysosperma</em> suite au dommage causé par le soleil sur le peuplier faux-tremble.
Vrilles de spores de <em>Cytospora chrysosperma</em> sur le peuplier faux-tremble.
Chancre causé par <em>Cytospora chrysosperma</em> sur le peuplier faux-tremble.
Chancre causé par <em>Cytospora chrysosperma</em> sur le peuplier baumier.
Vrilles de spores de <em>Cytospora chrysosperma</em> sur le saule.
Chancre cytosporéen causé par <em>Cystospora chrysosperma</em> sur le peuplier faux-tremble.

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Citer cette fiche

​Callan, B.E. 2024. Chancre cytosporéen. Dans J.P. Brandt, B.I. Daigle, J.-L. St-Germain, A.C. Skinner, B.C. Callan et V.G. Nealis, éditeurs. Arbres, insectes, acariens et maladies des forêts du Canada. Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts, Administration centrale. Ottawa, Ontario.