Rouille - balai de sorcière de l'épinette
- Nom de la maladie en anglais : Spruce broom rust
- Nom de l'agent pathogène : Chrysomyxa arctostaphyli Dietel
- Règne : Fungi
- Embranchement : Basidiomycota
- Classe : Pucciniomycetes
- Ordre : Pucciniales
- Famille : Coleosporiaceae
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Liste partielle des synonymes :
- Peridermium coloradense (Diet.) Arth. & Kem
Renseignements généraux et importance
La rouille – balai de sorcière de l'épinette est un champignon pathogène indigène qui alterne son cycle de vie entre deux hôtes (hétéroïques). Ce pathogène, bien qu'il soit rarement la cause directe de la mort des arbres, a un impact sur la qualité visuelle des arbres et peut affecter la productivité en bois des forêts aménagées. Ce pathogène prive son hôte des nutriments nécessaires à la croissance et à la reproduction des arbres.
Aire de répartition et hôtes
La rouille – balai de sorcière de l’épinette est présente dans toutes les provinces et territoires du Canada et dans l'ensemble des États-Unis, là où se trouvent les hôtes de l'agent pathogène. Elle est plus fréquente et plus abondante dans les régions des montagnes Rocheuses et de la forêt boréale d'Amérique du Nord.
La rouille – balai de sorcière de l'épinette est un parasite hétéroïque, ce qui signifie qu'une partie du cycle de vie du parasite se déroule sur un hôte et une autre partie sur un hôte secondaire, afin que le parasite puisse achever son cycle de vie. L'hôte primaire de cette espèce de rouille est l'épinette (Picea), et l'hôte secondaire est la busserole (Arctostaphylos). Les hôtes primaires les plus courants sont l'épinette noire (Picea mariana), l'épinette blanche (P. glauca), l'épinette d'Engelmann (P. engelmannii), l'épinette rouge (P. rubens) et l'épinette de Sitka (P. sitchensis). On la trouve également sur deux espèces d'arbres introduites : l'épinette bleue (P. pungens) et l'épinette de Norvège (P. abies). Les trois espèces de busserole (A. alpina, A. rubra et A. uva-ursi) peuvent servir d'hôtes secondaires pour le pathogène. Le manzanita (également dans le genre Arctostaphylos) est un hôte secondaire occasionnel de C. arctostaphyli.
Parties de l'arbre affectées
Épinette: aiguilles, tronc, rameaux et branches
Busserole : feuilles
Symptômes et signes
Une fois que le pathogène devient systémique dans les tissus ligneux, les infections par Chrysomyxa arctostaphyli stimulent la prolifération des branches, ce qui entraîne des excroissances anormales en forme de buisson appelées « balais de sorcière ». Les rameaux des balais sont plus courts et plus épais que la normale. Les balais poussent de manière pérenne et peuvent avoir plus de 30 ans et atteindre 2 mètres de diamètre. Les aiguilles d’épinette des balais sont plus petites que la normale et chlorotiques (jaunies). L’ensemble du balai apparaît jaune lorsque les écidies sont complètement matures sur les aiguilles d’épinette à l’intérieur du balai. Ces balais jaunes se distinguent par un contraste frappant avec les branches vertes saines environnantes de l’arbre. Lorsque le champignon sporule, les balais ont également une odeur piquante caractéristique. Toutes les aiguilles des balais tombent à la fin de la saison de croissance et les balais semblent morts.
Les spermogonies sont produites sous l'épiderme sur toutes les surfaces de l'aiguille. Elles sont jaunes au début et deviennent brunes avec l'âge. Elles sont aplaties, en forme de flacon, mesurent 110 à 150 micromètres de diamètre et présentent un pore central légèrement saillant à leur ouverture. Les caractéristiques des spermaties ne sont pas rapportées dans les descriptions publiées. Les écidies ressemblent à des cloques et se forment en rangées sur la face inférieure de l'aiguille de chaque côté de la nervure médiane. Elles mesurent 1 à 2 millimètres de long sur 0,8 millimètre de haut, et sont d'abord recouvertes d'un mince péridium blanc (couche de cellules fongiques), qui se rompt le long de la ligne médiane pour exposer les masses d'écidiospores jaune-orange qu'elles contiennent. Les éciospores sont unicellulaires, ellipsoïdes à globuleuses et mesurent 26 à 35 micromètres de long sur 16 à 25 micromètres de large. Leur paroi est incolore, épaisse de 2 à 3 micromètres, et densément recouverte d'une couche uniforme de verrues grossières. Le contenu huileux des écidiospores est orange lorsqu'il est frais et devient incolore avec le temps.
La rouille provoque des taches violacées sur les feuilles de l'hôte, la busserole. Les télies se forment dans les taches sur la face inférieure des feuilles d'un an, poussant à travers l'épiderme en coussinets cireux brun rougeâtre. Les téliospores se forment en chaînes dans les télies. Elles sont unicellulaires et incolores. Elles ont des parois minces et lisses et mesurent 23 à 64 micromètres de long sur 13 à 18 micromètres de large. Les basidiospores sont unicellulaires, avec un contenu cellulaire orange. Elles sont à parois lisses, largement ellipsoïdes à subglobuleuses et mesurent 8,5 à 9,5 micromètres sur 7,5 à 8,0 micromètres.
Plusieurs espèces de faux-gui (Arceuthobium, un genre de plante parasite) provoquent également des balais de sorcière sur l'épinette et peuvent être confondues avec la rouille – balai de sorcière de l’épinette. Cependant, les balais causés par le faux-gui conservent leurs aiguilles et restent verts toute l'année. Les petites pousses de faux-gui sont également présentes sur les branches et les rameaux des balais de faux-gui.
Cycle de la maladie
La rouille – balai de sorcière de l’épinette est un parasite hétéroïque obligatoire qui doit alterner entre ses hôtes conifères et ses hôtes busseroles pour compléter son cycle de vie complet de 2 ans. Cependant, contrairement à la plupart des autres espèces de Chrysomxya, elle ne présente pas de stade urédinien sur son hôte non-conifère. Les infections initiales sur les jeunes aiguilles d’épinette proviennent de basidiospores transportées par le vent à partir de plants de busserole voisins. À la suite de l’infection par les basidiospores en germination sur les aiguilles d’épinette, des spermogonies se développent et extrudent les spermaties en gouttelettes qui produisent une odeur forte et fétide. Les insectes sont attirés par l’odeur. Ils visitent les spermogonies et répandent les spermaties sur les hyphes réceptifs des spermaties adjacentes, les fertilisant. Après la germination, l’infection se propage aux jeunes aiguilles et les écidies commencent à se développer. Le mycélium de la rouille dans les aiguilles d’épinette envahit également les rameaux et les branches, devenant systémique et pérenne, provoquant éventuellement la formation de balais de sorcière. Au printemps de l'année suivante, des cloques éciformes se forment sur ces balais et libèrent un grand nombre d'écidiospores qui sont transportées par le vent jusqu'aux feuilles de busserole. Les écidiospores ne peuvent pas réinfecter l'épinette; elles ne peuvent infecter que la busserole. Si elles atterrissent sur les feuilles de busserole et que les écidiospores germent, l'infection qui en résulte provoque des taches foliaires, qui apparaissent au printemps sur ce feuillage hiverné infecté. À l'automne, des télies commencent à se développer sur les taches foliaires. Le printemps suivant, à peu près au moment où les nouvelles aiguilles d'épinette se développent à partir des bourgeons, les téliospores des télies mûrissent et germent pour produire des basides qui libèrent des basidiospores. Les téliospores restent dans le tissu foliaire. Elles ne constituent pas un mécanisme de dispersion. Les basidiospores ne peuvent pas réinfecter la busserole. Cependant, elles sont transportées par le vent et infectent les jeunes aiguilles d'épinette en développement.
Dommages
Ce pathogène infecte les épinettes de tous âges, entraînant une croissance réduite, des déformations et parfois la mort de l’arbre. L’étendue des dommages dépend du nombre et de la taille des balais dans chaque arbre, ainsi que de leur emplacement sur l’arbre. Lorsque les balais se forment sur le tronc principal de l’arbre, cela peut entraîner la mort de la cime, qui se produit lorsque la partie de l’arbre située au-dessus du balai meurt. Les arbres affaiblis sont plus vulnérables aux attaques secondaires de ravageurs et sont prédisposés aux champignons de pourriture. Ces champignons de pourriture peuvent diminuer le volume de bois marchand obtenu à partir des épinettes, ce qui réduit considérablement la valeur marchande des arbres. La pourriture interne du bois rend également les arbres hôtes structurellement instables et plus vulnérables aux tempêtes de vent et aux chutes de neige. Ces arbres compromis peuvent présenter des dangers dans les zones résidentielles et récréatives. Les arbres atteints de rouille – balai de sorcière de l’épinette présentent une réduction de croissance de 30 % et une mortalité trois fois plus élevée au cours de 10 ans par rapport aux arbres sains. L'un des avantages des grands groupes denses de balais est qu'ils peuvent fournir un abri et des zones de nidification à de nombreux oiseaux et petits mammifères.
La rouille – balai de sorcière de l'épinette peut fournir du combustible supplémentaire pour les incendies de forêt. Les grands balais sont remplis de petits rameaux et d'aiguilles mortes qui peuvent fournir un combustible étagé pour la propagation du feu vers le haut dans les cimes des arbres. Les feux de cimes sont beaucoup plus destructeurs que les incendies de surface. Les balais cassés pendant les tempêtes hivernales s'accumulent autour de la base des arbres infectés et augmentent le combustible disponible.
Prévention et répression
Les stratégies de répression d’un ravageur particulier varient suivant plusieurs facteurs, notamment :
- le niveau de la population du ravageur (c'est-à-dire le nombre de ravageurs présents sur l'hôte ou les hôtes affectés);
- les dommages prévus ou toute autre conséquence négative résultant de l'activité du ravageur et du niveau de sa population sur l'hôte, les biens ou l'environnement;
- la compréhension du cycle de vie du ravageur, de ses divers stades de développement, de même que des divers agents biotiques et non biotiques qui affectent les niveaux de ses populations;
- le nombre de spécimens hôtes individuels touchés (un seul arbre hôte, un petit groupe d’arbres hôtes, une plantation, une forêt);
- la valeur attribuée à l'hôte ou aux hôtes compte tenu des coûts rattachés aux approches de lutte contre le ravageur;
- la prise en considération des diverses approches de lutte de nature sylvicole, mécanique, chimique, biologique et naturelle, de même que de les avantages et désavantages de chacune.
L’acquisition d’information sur chacun de ses facteurs est nécessaire aux prises de décisions relatives à l’application de l’une ou l’autre des stratégies de lutte contre un ravageur. Ces facteurs devront être soigneusement mis en balance par rapport aux coûts et avantages avant qu'on entreprenne toute action contre un ravageur particulier.
La plupart des infections de rouille – balai de sorcière sur des épinettes individuelles ou sur un petit nombre d'épinettes peuvent être éliminées mécaniquement en élaguant les balais ou en coupant les arbres dont le tronc est déformé. Cette approche fonctionne bien pour les petites parcelles de terrain privé et les petits boisés où une surveillance régulière peut être effectuée et où les nouvelles infections peuvent être éliminées au fur et à mesure qu'elles se développent. Cette méthode est efficace pour prévenir la propagation des spores reproductrices.
Il n'existe aucun pesticide chimique qui se soit avéré efficace contre la rouille – balai de sorcière de l'épinette, tout en restant économiquement viable.
Photos
Un balai d'épinette causé par Chrysomyxa arctostaphyli qui a tué la cime de son épinette hôte. Pendant les mois d'hiver, le balai semble mort et sans aiguilles.
Alan Stewart
Un balai d'épinette causé par le champignon Chrysomyxa arctostaphyli avec des écidies sporulantes sur les aiguilles.
Eric Allen
Un petit balai d'épinette causé par le champignon Chrysomyxa arctostaphyli avec des écidies sporulantes sur les aiguilles.
Eric Allen
Gros plan d'aiguilles jaunies d'épinette infectées avec les écidies sporulantes du champignon Chrysomyxa arctostaphyli.
Eric Allen
Bibliographie sélective
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