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Carie brune cubique du pied

Renseignements généraux et importance

La carie brune cubique du pied est la maladie la plus grave de son genre dans les vieilles forêts de conifères d'Amérique du Nord. L'agent causal, Phaeolus schweinitzii, est pathogène pour une grande variété d'hôtes, tant conifères que feuillus. C'est la cause la plus courante de la carie brune cubique du douglas vert (Pseudotsuga menziesii).

Aire de répartition et hôtes

Phaeolus schweinitzii est présent partout au Canada. On le trouve en Alberta, en Colombie-Britannique, en Ontario, au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve-et-Labrador, à l'Île-du-Prince-Édouard et au Québec. Sa répartition est mondiale. De nombreuses espèces d'arbres indigènes du Canada appartenant aux genres suivants sont des hôtes : sapins (Abies), mélèzes (Larix), épinettes (Picea), pins (Pinus), douglas vert, ifs (Taxus), thuya (Thuja) et pruches (Tsuga). Une espèce de feuillu, le chêne de Garry (Quercus garryana), a également été signalée comme hôte au Canada.

Phaeolus schweinitzii a également été signalé occasionnellement sur des hôtes feuillus tels que le bouleau (Betula), le prunier et le cerisier (Prunus) et l'orme (Ulmus), ainsi que sur d'autres espèces en Amérique du Nord et ailleurs. Des conifères ont été infectés par P. schweinitzii lorsqu'ils ont été plantés sur des sites où seuls des feuillus poussaient auparavant.

Parties de l'arbre affectées

Les racines, le pied et jusqu’à 3 mètres du tronc inférieur de l’arbre peuvent être colonisés.

Symptômes et signes

Les signes de la carie brune cubique du pied dans les peuplements de conifères comprennent la présence de conifères renversés par le vent présentant une carie exposée, en plus de la présence de fructifications, soit à la base de l'arbre, sur le pied ou sur le sol au-dessus du système racinaire de l'arbre. Si l'arbre est gravement malade, une diminution de la croissance de la couronne et un dépérissement des branches peuvent être évidents, surtout si l'arbre se trouve sur un site pauvre.

Les fructifications de P. schweinitzii sont produites chaque année, mais comme elles sont grandes et ont une consistance assez dure, elles peuvent persister un an ou deux avant de se désintégrer. Les fructifications sont produites soit sur le sol, reliées par un cordon de mycélium au système racinaire de l'arbre hôte, soit à la base de l'arbre ou de la souche, et poussent parfois sur le tronc inférieur des vieux arbres morts. Elles sont généralement pédonculées, soit solitaires et en forme d'entonnoir, soit en grappe en forme de rosette sur le sol, soit en couches de plateaux lorsqu'elles fructifient sur le pied de l'arbre. Elles peuvent atteindre jusqu'à 25 centimètres de diamètre, avec des tiges centrales ayant jusqu'à 5 centimètres de diamètre. Les fructifications qui poussent depuis le sol engloutissent souvent les tiges des plantes voisines ou d'autres objets lorsqu'elles se développent. La surface supérieure de la fructification est brun rougeâtre foncé, bosselée, avec des sillons concentriques et une texture grossièrement veloutée. Les jeunes fructifications et les bords des vieux basidiomes sont généralement jaune verdâtre, mais certaines variantes ont des bords orange vif. La surface inférieure des fructifications est d'abord jaune verdâtre, puis s'assombrit pour devenir brun verdâtre, puis enfin brun foncé à pleine maturité. Les pores de la face inférieure sont ronds ou en forme de labyrinthe, avec une densité de 1 à 3 pores par millimètre. Le système hyphal est monomitique, constitué d'hyphes mesurant 3 à 17 micromètres de diamètre. L'hyménium est constitué d'une fine couche de cellules recouvrant la surface interne des pores et présente une caractéristique distinctive d'hyphes gléoplères bruns (hyphes à contenu huileux). Les basides de l'hyménium portent chacune quatre basidiospores hyalines, lisses, ellipsoïdes à ovales mesurant 6 à 8 micromètres sur 4 à 5 micromètres. Le mycélium de P. schweinitzii forme également des spores résistantes à parois épaisses appelées chlamydospores.

Le bois infecté est d'abord jauni, puis devient brun et se fissure en cubes lorsque le champignon décompose la cellulose, laissant derrière lui la lignine foncée et cassante. Des feutres mycéliens bruns, minces et résineux peuvent être trouvés dans les fissures du bois. Bien que la plupart des pourritures se produisent dans les racines et au pied de l'arbre, elles peuvent s'étendre jusqu'à 3 mètres de haut dans le tronc. Une pourriture avancée peut être confondue avec d’autres carie brune cubique ou, dans le cas du thuya géant, avec la pourriture causée par Oligoporus sericeomollis.

Cycle de la maladie

Tous les éléments du cycle de la maladie ne sont pas encore entièrement compris. Les fructifications sont produites chaque année à la fin de l'été ou à l'automne dans les régions où les étés sont secs. Les basidiospores produites par les fructifications sont libérées des pores et se propagent dans l'air. Si elles atterrissent sur le sol, elles peuvent s'établir et produire du mycélium dans le sol en l'absence d'hôte. Les chlamydospores sont également produites par le mycélium dans le sol. Le rôle des colonies du sol dans le déclenchement de nouvelles infections n'a pas été entièrement documenté, mais on pense que la plupart des infections initiales proviennent des basidiospores. Comme il a été démontré que les arbres infectés adjacents hébergent différents clones du champignon, le contact de racine à racine n'est pas considéré comme un mode d'infection. Les arbres malades présentent souvent des cicatrices dues à des dommages antérieurs aux racines ou au pied, qui peuvent servir de terrain d'infection. Les anciennes cicatrices de feu sont notamment très fréquentes sur les conifères atteints de la carie brune cubique du pied. Les cicatrices d'exploitation forestière sont une autre surface sujette aux infections. Les extrémités des racines peuvent être infectées et tuées lorsqu'elles entrent en contact avec le champignon, ce qui fait que les parties restantes deviennent gonflées et trapues, avec des centres résineux. 

Dommages

Les arbres de tous âges peuvent être infectés par P. schweinitzii, mais le plus souvent, les arbres plus âgés sont tués et les niveaux les plus élevés de pourriture et de dommages se produisent chez les arbres de plus de 100 ans. La réduction de la taille des extrémités des racines et la pourriture brune cubique des principales racines structurelles rendent les arbres infectés vulnérables au chablis ou à la rupture du tronc inférieur. Les infections prédisposent les arbres à d'autres agents pathogènes plus agressifs tels qu’Armillaria. Les grands arbres présentant une pourriture avancée auront des niveaux élevés de rebuts dans la bille de pied.

Prévention et répression

Les pratiques d’aménagement forestier qui réduisent les dommages causés par les incendies et les dommages mécaniques à la base des arbres dans les peuplements de conifères matures réduiraient l'incidence de la carie brune cubique du pied.

Les arbres portant des fructifications (ou dont les fructifications se trouvent au sol au-dessus de leurs systèmes racinaires) doivent être évalués pour déterminer leur défaillance potentielle s'ils sont proches de bâtiments ou se trouvent dans des zones récréatives où ils pourraient présenter un danger pour les personnes.

Les stratégies de répression d’un ravageur particulier varient suivant plusieurs facteurs, notamment :

L’acquisition d’information sur chacun de ces facteurs est nécessaire aux prises de décisions relatives à l’application de l’une ou l’autre des stratégies de lutte contre un ravageur. Ces facteurs devront être soigneusement mis en balance par rapport aux coûts et avantages avant qu’on entreprenne toute action contre un ravageur particulier.

Photos

Fructification de <em>Phaeolus schweinitzii </em>sur la souche d'une pruche du Canada.
Fructification de <em>Phaeolus schweinitzii</em> sur une pruche du Canada.
Décomposition avancée du douglas, causée par <em>Phaeolus schweinitzii</em>, présentant une carie brune cubique.
Décomposition avancée du douglas, causée par <em>Phaeolus schweinitzii</em>, présentant une carie brune cubique.
Décomposition avancée du douglas, causée par <em>Phaeolus schweinitzii</em>, présentant une carie brune cubique.
Fructifications de <em>Phaeolus schweinitzii</em> engloutissant les semis de sapin baumier.

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Citer cette fiche

Callan, B.E. 2024. Carie brune cubique du pied. Dans J.P. Brandt, B.I. Daigle, J.-L. St-Germain, A.C. Skinner, B.C. Callan et V.G. Nealis, éditeurs. Arbres, insectes, acariens et maladies des forêts du Canada. Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts, Administration centrale. Ottawa, Ontario.