Sélection de la langue

Recherche


Tordeuse occidentale de l'épinette

Renseignements généraux et importance

La tordeuse occidentale de l'épinette est un défoliateur indigène des conifères de l'ouest de l'Amérique du Nord. Au Canada, des infestations périodiques se produisent dans les forêts côtières et intérieures, y compris les forêts de piémont sur les pentes est des montagnes Rocheuses. Historiquement, les infestations au Canada étaient associées à des infestations plus étendues dans le nord-ouest du Pacifique des États-Unis, se produisant à des intervalles de 30 à 40 ans. La durée des infestations était plus courte dans la partie canadienne de l'aire de répartition. Cependant, il y a eu au moins trois grandes infestations en Colombie-Britannique depuis 1970, la dernière ayant débuté à la fin des années 1990 et s'étant poursuivie jusqu'en 2016. Pour la première fois dans l'histoire des relevés sur les insectes forestiers, une plus grande surface de forêt a été défoliée en Colombie-Britannique qu'aux États-Unis. Cette défoliation a touché des forêts situées plus au nord et à des altitudes plus élevées que ce qui avait été enregistré précédemment.

Les infestations de tordeuses occidentales de l'épinette sont associées à des peuplements forestiers matures dominés par des arbres hôtes primaires, tels que le douglas vert (Pseudotsuga menziesii). L'intensité de la défoliation est la plus forte dans les peuplements denses dont la canopée est fermée. Les infestations sont plus fréquentes dans les forêts de douglas verts les plus chaudes et les plus sèches de l'intérieur du pays.

Aire de répartition et hôtes

La tordeuse occidentale de l'épinette est présente du Nouveau-Mexique (États-Unis) au centre de la Colombie-Britannique (Canada), à l'ouest des forêts de piémont du versant est des Rocheuses jusqu'à la côte du Pacifique. Elle se trouve généralement à une altitude élevée (>1500 mètres) dans la partie sud de son aire de répartition et à une altitude moyenne à basse (< 1200 mètres) dans son aire de répartition canadienne. Les principaux hôtes sont le douglas vert, les sapins (Abies) et, dans une moindre mesure, l'épinette d'Engelmann (Picea engelmannii). Au Canada, le douglas vert est essentiellement l'hôte exclusif, car le sapin et l'épinette que l’on retrouve à ces latitudes se trouvent à des altitudes plus élevées que les zones occupées historiquement par la tordeuse occidentale de l'épinette.

Parties de l'arbre affectées

Bourgeons et aiguilles de l'année en cours, cônes de pollen immatures.

Symptômes et signes

Les œufs de couleur verte sont pondus en rangées superposées sur des aiguilles de l’arbre hôte. Juste avant l'éclosion, la tête sombre de la larve en développement est visible dans chaque œuf fertile. Les larves des premiers stades ont une tête rougeâtre à brun foncé et un corps brun pâle, sans marque distinctive. Les larves au stade final mesurent de 18 à 25 millimètres de long, leur tête est brun rougeâtre et leur corps est marqué nettement de deux rangées de taches de couleur crème sur chaque segment dorsal. L'envergure des adultes est de 24 à 28 millimètres. La couleur principale des ailes est brun rougeâtre, avec des marques blanches et brun foncé.

Les petites larves de la tordeuse occidentale de l'épinette qui émergent tôt endommagent de nombreux bourgeons. Ceci n'est visible qu'en cas d'inspection minutieuse. Plus tard, les grandes larves construisent des abris protecteurs pour se nourrir en attachant les aiguilles ensemble avec de la soie. La combinaison de la soie et des aiguilles endommagées est visible sur les nouvelles pousses de la couronne supérieure. Lorsque les aiguilles endommagées sèchent au milieu de l'été, la couronne de l'arbre devient rouge. Ce changement d'aspect spectaculaire peut se produire rapidement dans les forêts sèches de l'intérieur du pays. Si la défoliation persiste pendant plusieurs années, la couronne de l'arbre s'éclaircit et les branches peuvent mourir. Les petits arbres du sous-étage forestier peuvent également être gravement endommagés.

Cycle de vie

La tordeuse occidentale de l'épinette produit une génération par année. Selon le lieu et l'année, les œufs sont pondus entre la fin juillet et la mi-août. Ces derniers sont déposés sur les aiguilles en masses de 20 à 50 œufs qui se chevauchent. Les œufs éclosent au bout d'environ une semaine. Les tordeuses nouvellement écloses ne se nourrissent pas. Elles se déplacent du feuillage vers l'intérieur de l'arbre et s'installent dans des niches protégées, telles que les crevasses de l'écorce. Elles se recouvrent de soie et passent l'hiver en dormance.

Les petites larves de tordeuse sortent de leur hibernation au mois de mai suivant et retournent à l'extrémité des branches à la recherche de bourgeons frais. L'émergence a lieu généralement 2 à 3 semaines avant l'éclosion des bourgeons. Les petites larves de tordeuses se nourrissent pendant cette période en exploitant les aiguilles des années précédentes et les cônes de pollen frais, s'ils sont disponibles. Lorsque les bourgeons de l'année en cours gonflent, les tordeuses les pénètrent. Une fois que les bourgeons ont débourré, les larves de tordeuses construisent des abris pour se nourrir en attachant les aiguilles ensemble avec de la soie. Elles se nourrissent jusqu'à la mi-juillet ou la fin juillet et se transforment souvent en pupe dans ces abris. Les papillons adultes émergent au bout d'environ une semaine. La femelle émet une phéromone qui attire les mâles pour qu'ils s'accouplent. Les papillons deviennent actifs au crépuscule, volant souvent au-dessus du couvert forestier, et peuvent être transportés sur plusieurs kilomètres par les courants d’air.

L'épuisement du feuillage disponible et l'évolution de l'état de la forêt au cours d'une infestation réduisent la survie de la tordeuse occidentale de l'épinette. Les effets accrus des ennemis naturels, tels que les prédateurs, les maladies et les parasitoïdes, finissent par se combiner pour réduire davantage la survie des tordeuses. Une fois que les populations de tordeuses occidentales de l'épinette deviennent suffisamment faibles, elles peuvent être maintenues dans un état inoffensif par les ennemis naturels.

Dommages

Lors des infestations, des centaines de milliers d'hectares de forêt peuvent être endommagés, bien que la défoliation complète des aiguilles de l'année en cours dans les arbres matures soit une exception. Les aiguilles de douglas verts des années précédentes sont rarement endommagées et les arbres codominants se rétablissent généralement. La mortalité survient après plusieurs années de défoliation et n'est fréquente que chez le principal hôte canadien, le douglas vert. Les sapins sont des hôtes plus abondants et plus vulnérables aux États-Unis et représentent la plupart des cas de mortalité signalés dans ce pays. Les arbres en sous-étage sont également plus vulnérables, car ils ont moins de feuillage et sont sujets aux attaques des tordeuses qui tombent sur eux des arbres matures situés au-dessus d'eux. La défoliation réduit la croissance radiale des arbres, quelle que soit leur essence ou leur taille. Les arbres compensent la perte d'aiguilles en produisant plus de bourgeons sur des pousses plus courtes pendant quelques années après la défoliation.

Les dommages causés aux cônes de pollen peuvent être importants dans les vergers à graines aménagés. Les plantations d'arbres de Noël peuvent également être menacées si elles sont situées à proximité d’infestations dans des peuplements naturels plus importants.

Des effets secondaires de la défoliation, notamment les attaques de scolytes, les agents pathogènes ou l'augmentation du risque d'incendie ont été suggérés, mais les données probantes les concernant sont anecdotiques. Il est certain que si les arbres matures sont tués, ils seront utilisés par de nombreux autres organismes au fur et à mesure qu'ils se décomposent. Les forêts sèches de l’intérieur du pays où ont sévit les récentes infestations de la tordeuse occidentale de l'épinette sont naturellement sujettes aux incendies, de sorte que l'augmentation du risque d'incendie à la suite de la défoliation est progressive.

Les effets écologiques des infestations comprennent l'élimination sélective des arbres du sous-étage forestier, ce qui favorise la croissance des arbres matures. La réduction des petits arbres en sous-étage peut réduire le risque d'incendie car ces derniers représentent en temps normal un combustible favorisant le déplacement des incendies destructeurs vers la couronne des arbres. Le résultat potentiel d'une mortalité importante des arbres matures suite aux dommages de la tordeuse peut être la conversion du peuplement en une nouvelle forêt plus jeune composée de semis des mêmes essences, ou en une forêt dont la composition du peuplement est différente.

Prévention et répression

Les stratégies de répression d’un ravageur particulier varient suivant plusieurs facteurs, notamment :

L’acquisition d’information sur chacun de ses facteurs est nécessaire aux prises de décisions relatives à l’application de l’une ou l’autre des stratégies de lutte contre un ravageur. Ces facteurs devront être soigneusement mis en balance par rapport aux coûts et avantages avant qu'on entreprenne toute action contre un ravageur particulier.

Toutes les forêts dominées par des arbres hôtes dans l'aire de répartition de la tordeuse occidentale de l'épinette sont vulnérables aux infestations dommageables. La vulnérabilité dépend toutefois de la gravité et de la durée de l’infestation, ainsi que de l'essence concernée. Par exemple, l'arbre hôte principal au Canada, le douglas vert, est beaucoup moins vulnérable que le sapin grandissime (A. grandis) et se rétablit généralement de la défoliation.

Les responsables de la lutte contre les ravageurs forestiers surveillent les niveaux de population en piégeant les papillons à l'aide de phéromones et en prélevant des échantillons de branches à la recherche de masses d'œufs. La mortalité des arbres est la principale préoccupation relative aux infestations, c'est pourquoi l'intervention avec des insecticides n'a généralement lieu qu'après quelques années de défoliation grave. Plusieurs insecticides ont été utilisés contre la tordeuse occidentale de l'épinette. Des virus spécifiques d'origine naturelle ont été étudiés. Une grande partie de la défoliation annuelle est causée par de petites larves qui se nourrissent à l'intérieur des bourgeons, où elles sont relativement protégées des pesticides. Les insecticides et les phéromones sont définis comme des produits antiparasitaires et sont réglementés au Canada. Les produits homologués pour être utilisés contre la tordeuse occidentale de l'épinette dans des situations particulières peuvent changer d'une année à l'autre. Ainsi, pour connaître les produits actuellement homologués et pour obtenir des renseignements quant à leur usage contre ce ravageur, veuillez consulter la base de données Information sur les produits antiparasitaires de Santé Canada. Tout produit homologué devrait être appliqué en fonction de la taille de la population et seulement lorsque nécessaire et au stade de vie indiqué. Il est recommandé également de consulter un professionnel local en arboriculture. Les pesticides peuvent être toxiques pour les humains, les animaux, les oiseaux, les poissons et d’autres insectes utiles. Veuillez, par conséquent, appliquer les produits homologués uniquement en cas de besoin et conformément aux indications inscrites sur l’étiquette du fabricant. Dans certaines juridictions et dans certaines situations, seul un professionnel autorisé peut appliquer des pesticides. Il est recommandé de consulter les autorités locales compétentes pour déterminer les réglementations locales en vigueur.

Des niveaux de mortalité significatifs des arbres ne se produisent qu'après plusieurs années de défoliation grave, de sorte que l'accélération de la récolte dans les peuplements matures est une option d’aménagement réalisable. La coupe de récupération peut permettre de récupérer une partie de la valeur commerciale des forêts ayant subi des dommages lorsque la mortalité a déjà eu lieu.

Les méthodes sylvicoles utilisées pour réduire les dommages causés par la tordeuse sont limitées. Les petits arbres hôtes en sous-étage sont plus vulnérables que les arbres matures, ce qui rend impraticables les pratiques sylvicoles touchant plusieurs étages forestiers, c’est-à-dire où les arbres codominants abritent la régénération préexistante. Réduire la densité des arbres hôtes et favoriser les peuplements mixtes peut s'avérer plus efficace pour réduire les répercussions négatives. Dans le nord-ouest du Pacifique aux États-Unis, la suppression des incendies favorise à la fois la régénération des sapins plus vulnérables et la régénération préexistante. Cela peut contribuer à accroître la vulnérabilité des peuplements.

Photos

Larve mature de la tordeuse occidentale de l’épinette sur une pousse de douglas.
Larve mature de la tordeuse occidentale de l’épinette sur une pousse de douglas.
Gros plan de la défoliation causée par les larves de la tordeuse occidentale de l’épinette.

Références sélectionnées

Axelson, J.N.; Smith, D.J.; Daniels, L.D. et Alfaro, R.I. 2015. Multicentury reconstruction of western spruce budworm outbreaks in central British Columbia, Canada. Forest Ecology and Management, 335, 235-248. https://doi.org/10.1016/j.foreco.2014.10.002

Harris, J.W.E.; Alfaro, R.I.; Dawson, A.F. et Brown, R.G. 1985. The western spruce budworm in British Columbia 1909-1983. Service canadien des forêts, Centre de foresterie du Pacifique. Victoria, Colombie-Britannique. Rapport d’information BC-X-257. 32 p. https://ostrnrcan-dostrncan.canada.ca/entities/publication/06da2bf6-6f68-4b0d-903a-750832d607f6?fromSearchPage=true

Maclauchlan, L.E.; Daniels, L.D.; Hodge, J.C. et Brooks, J.E. 2018. Characterization of western spruce budworm outbreak regions in the British Columbia Interior. Revue canadienne de recherche forestière, 48(7), 783-802. https://doi.org/10.1139/cjfr-2017-0278

Nealis, V.G. 2016. Comparative ecology of conifer-feeding spruce budworms. The Canadian Entomologist, 148(S1), S33-S57. https://doi.org/10.4039/tce.2015.15

Nealis, V.G. et Régnière, J. 2021. Ecology of outbreak populations of the western spruce budworm. Ecosphere, 12(7), e03667. https://doi.org/10.1002/ecs2.3667

Parfett, N.; Clarke, D. et Van Sickle, A. 1994. Using a geographical information system for the input and analysis of historical western spruce budworm in British Columbia. Co-publié par le Service canadien des forêts, Centre de foresterie du Pacifique. Victoria, Colombie-Britannique, et le ministère des Forêts de la Colombie-Britannique. Rapport FRDA 219. 32 p. https://ostrnrcan-dostrncan.canada.ca/entities/publication/f5ad95dd-02b1-48c4-8b36-71cfcac8a9b1?fromSearchPage=true

Shepherd, R.F.; Cunningham, J.C. et Otvos, I.S. 1995. Tordeuse occidentale de l’épinette, Choristoneura occidentalis. (Chapitre 11) Pages 119-121 dans J.A. Armstrong et W.G.H. Ives, éditeurs. Insectes forestiers ravageurs au Canada. Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts, Direction des sciences et du développement durable. Ottawa, Ontario. 732 p. https://publications.gc.ca/site/eng/9.889231/publication.html

Citer cette fiche

Nealis, V.G. 2024. Tordeuse occidentale de l'épinette. Dans J.P. Brandt, B.I. Daigle, J.-L. St-Germain, A.C. Skinner, B.C. Callan et V.G. Nealis, éditeurs. Arbres, insectes, acariens et maladies des forêts du Canada. Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts, Administration centrale. Ottawa, Ontario.